Artiste-peintre

La démarche d’Amalfi Rendón Zipagauta 

Des traces graphiques mêlées à une palette riche et ingénieuse de coups de pinceau jetés sur les murs de nos villes scintillent avec un véritable bonheur dans les portraits qu’Amalfi Rendón Zipagauta présente aujourd’hui.

Le mélange des pigments qu’elle utilise dans le coloris de ses toiles et papiers à dessin – de simples touches de couleur – donne de l’éclat aux masques de ses personnages, les affranchissant de leurs obligations quotidiennes et les rendant plus proches, du fait de la douceur des tons, du subtil maniement des lumières et ombres - tel un art rupestre, archaïque aux couleurs estompées par le temps – et du contraste entre le jour et la nuit, entre ce que nous avons été et ce que nous sommes devenus, ouvrant la voie à la contemplation. Portrait
Dans sa création, on devine le plaisir de dessiner, de peindre, de colorier tout naturellement, avec ardeur. De son enfance et adolescence en Colombie, où sa passion s’est réveillée et les premiers fruits de sa vocation première ont été récoltés, à son exil studieux dans les villes-musées d’Europe, elle incarne le type d’artiste qui ne s’embarrasse pas du mythe du chef d’œuvre pour concrétiser, à tout moment, son plaisir de façonner, mettre en oeuvre et découvrir ainsi les secrets de la matière, ce qui éclot quand on sait se donner jour après jour au processus de la création sans parti pris, sans crainte.

Dans sa quête et son alchimie, l’artiste peut, grâce à son imaginaire et à son public en devenir – vous, nous, les amoureux de l’art – se hisser sur le haut d’un mont où il est tout seul et pouvoir saisir ainsi l’ «imperceptible » -tel Baudelaire, dans sa mansarde métaphorique parisienne, parlant des « nuages merveilleux »- puis, en déambulant dans la rue, parcourir inlassablement les gens du regard, comme un pinceau aimant, pour découvrir l’atlas des visages.

C’est ainsi que je perçois le regard d’Amalfi. Elle s’attelle à nous scruter, à détailler avec des touches de couleur les reflets et formes de notre visage, véritable reflet de l’âme. Adonnée, depuis sa plus tendre enfance, au dessin, aux couleurs, à saisir les formes, les spectres, les volumes, les ombres, l’ « envoûtement » de ses modèles, elle crée des liens et une complicité avec ceux qui sont attirés par le champ « visuel » car, dans le mouvement et les lumières de ses portraits et études de corps, il y a un reflet de l’art cinématographique.

Elle aime saisir en quelques lignes, coups de crayon ou de pinceau l’essence de l’être qui s’offre à elle, immobile ; ses yeux métamorphosent en couleurs ce qui se dégage du modèle, captent les traits et plis, les vibrations et flux lumineux, et se fraient un chemin entre l’esquisse et les ombres de l’incréé, d’où surgit sa propre création.

Les pigments qu’elle prépare avec une volupté envoûtante, constance qui l’anime pour tout ce qui a trait à son art, s’inclinent devant son pouvoir et deviennent dociles face à la transparence, à l’éclat, nous donnant parfois la sensation d’être face à un « scanner » romantique, du fait que nous soyons résolument modernes. Sur le divan, comme elle se plaît à nommer le rite de la pose, elle pourra dégager de ses modèles des éléments essentiels : les traces d’un ancêtre africain lointain, la rigueur d’un juge tel Salomon, le chagrin profond d’un ami qui s’apaise en se laissant faire le portrait…

Coloriste par vocation, Amalfi Rendón Zipagauta revendique sa passion pour les gammes infinies de couleurs chaudes du fait de ses origines « tropicales », ce qu’elle a découvert par le biais de l’enseignement des beaux-arts en Europe, où elle vit et travaille depuis 1979.

Julio OLACIREGUI
Journaliste et écrivain

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